La Guyane est un département français situé en Amérique du Sud, séparée du Brésil au sud-est par l’Oyapock et au nord du Surinam par le Maroni. Au large de Kourou, se dressent les tristement célèbres îles du salut. Ces trois îlots, Saint Joseph, le diable et Royale, ont abrité pendant plusieurs décennies le terrible bagne avec des prisonniers célèbres comme Dreyfus, Seznec…. Voici le récit d’une pêche en Guyane, un voyage de pêche mémorable.
La pêche au tarpon en Guyane
La pêche se pratique autour des îles, et c’est la couleur des eaux qui détermine la présence de telle ou telle espèce . En effet, en dehors des tarpons, des accoupas rouges et des mérous, qui sont présent indépendamment de la couleur des eaux, d’autres espèces peuvent venir se greffer si les eaux tendent vers le bleu. Les carangues, les maquereaux bonites sont de celles là.
Mais le seigneur des eaux, celui pour lequel les pêcheurs font des kilomètres c’est le roi d’argent, le Palika, plus communément connu sous le nom de tarpon.
Tarponaute
Le tarpon (Megalops Atlanticus) ou palika
Les tarpons sont pêchés principalement autour des îles du salut , parfois même très près des îles. Suivant les postes, on trouve des babys et des poissons plus gros mélangés mais il y a quelques postes spécifiques. La maison de Dreyfus est un excellent spot à baby, la façade atlantique de l’île du diable est aussi un excellent spot à pêcher à tape caillou au vitala et au leurre plongeant type rattlin.
Les plus gros spécimens se prennent surtout du coté de la déferlante de l’île Saint Joseph, c’est notre coin de pêche préféré. Sur ces mêmes postes, vous pouvez aussi toucher un gros mérou mais les très gros (plus de 200 kilos) deviennent de plus en plus rares.
Le seul inconvénient de ces postes est que nous devons pêcher à l’ancre, et que la mer en Guyane et particulièrement aux îles n’est pas des plus plates. On prend la houle par le travers du bateau. Si vous avez le mal de mer, vous risquez de souffrir.
La pêche au leurre en guyane
Commençons par détailler la pêche au leurre en Guyane. Il y a quelques années de cela, Richard Dupont, guide de pêche, avait sur son bateau un client originaire du Languedoc. Et parfois, comme cela arrive quand on cherche les beaux poissons, les touches se faisaient attendre. Ce client plongea dans sa boite à pêche perso et en sorti un vitala thonidés couleur RH . Il toucha alors poissons sur poissons, la légende était née …
Il serait inconcevable de vous rendre en Guyane aujourd’hui, sans emporter une bonne dizaine de vitalas thonidés couleur RH. Le maniement du leurre doit être le plus lent possible et vous devez pêcher le plus profondément possible. Mais attention le triple est positionné sous le vitala, il faut donc être vigilant.
La touche est une succession de coups de nez sur le leurre, comme si le tarpon le testait. Il ne faut surtout pas ferrer car le tarpon n’a pas engamé. Par contre l’adrénaline, elle, monte car il y en a un qui joue avec le leurre. Il peut jouer pendant parfois vingt mètres avant de se décider à engamer ou non. S’il engame, vous sentez alors un poids de plus en plus lourd sur la canne. A ce moment là, vous devez ferrer de toutes vos forces car le tarpon a la gueule pavée et il faut faire pénétrer une branche du triple correctement sinon vous ne verrez votre poisson qu’une seule fois.
Je reviens sur la touche car c’est là que pour la première fois de votre vie vous courrez le risque d’attraper la tarponite, maladie comparable au paludisme, vous l’avez à vie dans le sang. La magie de la touche et les quelques instants qui suivent marqueront à jamais votre mémoire de pêcheur.
Imaginez vous sous les tropiques, le ciel est bleu, la mer vous berce lentement, canne en main, vous lancez votre leurre, vous êtes concentré sur sa nage, …toc toc … toc toc toc …TOC TOC TOC TOC , vous sentez le poids au bout de la ligne, vous ferrez à plusieurs reprises comme un fou, et …et … . ET dans les 2 secondes qui suivent, jailli à quelques mètres de vous, un poisson d’argent de 70 kilos qui décolle à plus de 2 mètres de hauteur ..…ouahouh (arrêt sur image) ….. se débattant pour se libérer de votre ligne.
Bien évidemment, vous rendez la main sur le saut mais subjugué par ce que vous venez de vivre vous venez de perdre votre premier gros tarpon… Trop tard, le mal est fait …Et c’est avec encore plus de conviction que vous relancer votre leurre.
Quand à nouveau, toc toc, ferrage, et nouveau saut mais cette fois, vous y êtes, au cinquième saut, le poisson est toujours au bout, il sonde, remonte, vous gratifie d’une longue glissade sur la queue avec la moitié du corps hors de l’eau, repart sous le bateau. Vous sentez votre adversaire faiblir, il arrive au bateau, le lignage est proche, bas de ligne en main, votre poisson approche pour resauter de plus bel dans un dernier effort. Enfin, il est là, le long du bateau, vaincu mais pas mort . Vite, photos, on plonge dans l’eau, l’appareil photo fonctionne à plein régime. Vous prenez alors la pince pour enlever le triple de la lèvre supérieure, un bon coup de main sur son ventre et votre tarpon rejoint son élément… Vous fermez alors les yeux pour mémoriser à jamais ce moment de bonheur. Il vous faudra parfois de longues minutes pour remettre en pêche mais des moments pareils se savourent.
pêcher à la calée en Guyane
La pêche à la calée est une technique de pêche intéressante en Guyane. Vous pouvez utiliser un poisson mort, un strip de poisson voir un vif. La fraîcheur est primordiale. Il faut descendre l’appât et attendre la touche. La touche est généralement puissante et le combat qui s’en suit est toujours le même, saut quasi immédiat, belle bagarre et un poisson qui retourne à son élément.
Les jours se suivent et ne se ressemblent pas, c’est surtout la couleur des eaux, qui influe sur la pêche et sur la technique de pêche. Si les eaux sont boueuses, il est inutile d’y lancer un vitala, il faudra consacrer son énergie à la pêche en calée , quitte à prendre la canne en main en permanence. C’est ce qui m’a valu une belle pêche cette année malgré des eaux difficiles. Ce n’est pas non plus une pêche des plus régulières mais ce qui fait la valeur de la Guyane c’est que vous toucherez toujours au moins un beau poisson par jour à la bonne saison .
Les jours de folies existent aussi, merci St Pierre, il y a quelques années, nous avons touché et pris plus de 50 tarpons à 3 pêcheurs dans l’après midi , certes pas des monstres mais que de sauts et que d’images dans la tête. L’an passé, nous avons touché sur dans la même journée 17 tarpons de plus de 50 kilos et en avons amenés 13 au bateau…..
La taille des gros tarpons oscille entre 50 et 90 kilos , les plus de cent kilos sont très rares. Nous sommes loin des poissons trophées de Galinhas, mais le nombre de touches est près de dix fois supérieures. Et question combat, je préfère un poisson acrobatique qui saute hors de l’eau, les très gros sortant péniblement la moitié du corps. J’ai le souvenir d’un poisson de 70 kilos ayant sauté 23 fois avant d’être ligné… que du bonheur.
Il y a des poissons mythiques, comme le marlin, le tarpon fait partie de ces poissons qui marquent la mémoire visuelle d’un pêcheur . Je vous souhaite à tous d’en faire sauter un beau au moins une fois dans votre vie, vous n’oublierez jamais ce moment…
Quelques surprises lors des sessions de pêche en Guyane
En pêchant en calée, vous pourrez avoir de bonnes et de moins bonnes surprises .
Commençons par la mauvaise surprise : elle est se caractérise par un corps long, une tête pas très sympa et des dents qui font peur. Ajoutez à cela que sa spécialité est de tourner sur elle même… vous l’aurez compris, il s’agit de la murène. Oh il y en a de toutes les couleurs. Elles ont leur spécialiste (un petit clin d’œil à Jean Louis) et ont pour spécificité de ne jamais vouloir rendre les hameçons qu’elles ont avalé et de s’enrouler sur le bas de ligne au point de pouvoir remonter jusqu’en haut de la canne et là elles se font un petit plaisir si vous ne réagissez pas à temps… Quand il n’y a plus de fil en tête de canne, elles s’enroulent autour du blank et crac… une canne de cassée…
Dans le registre des bonnes surprises : il y a les accoupas rouges. Ce superbe poisson mord surtout sur les petits appâts, il est piètre combattant sur 50 lbs mais sur 16 ou 20 lbs avec une recherche spécifique… Et surtout c’est un poisson aux couleurs magnifiques, l’intérieur de la bouche est jaune orangé, le corps argent est très brillant. C’est un plaisir que de relâcher de pareils poissons plutôt que d’en remplir des glacières…
Enfin, il y a la touche du mérou. Au vitala, vous prenez un coup sourd puis l’impression de tenir le fond. C ‘est un combat tout en puissance pendant lequel le mérou n’a qu’une idée en tête, rejoindre son trou. Si vous parvenez à lui tenir tête, après un combat durant lequel vous aurez eu l’impression d’avoir attraper le fond plusieurs fois, vous verrez rouler en surface un beau bébé pouvant faire entre 50 et 150 kilos. Pour ce type de poisson, en recherche spécifique avec un appât conséquent, un ensemble zenacq 83.5 ou muramura 76 avec un stella ou un saltiga et une tresse 65 lbs est impératif si vous ne voulez pas laisser un monstre regagner son trou.
Avec mes amis, la palme revient à Pascal avec un poisson de 174 cm de longueur pour 164 cm de tour de taille… et pris au vitala… et chez les locaux, Hervé avec un poisson de près de 300 kilos…
Voilà un petit aperçu du jardin secret des îles du salut . Il vous reste à découvrir ensuite la pêche derrière les crevettiers mais aussi la pêche en eau douce, en remontant les fleuves à la recherche d’un poisson préhistorique, l’aïmara… mais ça ce sera pour une prochaine fois…